Auriane... confrontée à la crise sanitaire aux États-Unis
Source DNA du 17/04/2020
Auriane Viola (Lingolsheim) confrontée à la crise sanitaire aux États-Unis
L'amitié en attendant l'envol
Championne de France junior en salle en 2019, la perchiste Auriane Viola a voulu donner un coup d’accélérateur à ses études et à sa carrière sportive en partant aux États-Unis. En pleine pandémie, elle est accueillie par la famille de Madelyn Horne, devenue son amie.
«Mon père a eu une grande influence. Il m’a poussé à aller au bout. Je le remercie de ne pas m’avoir laissé passer à côté d’une si belle opportunité.» Malgré les aléas liés au Covid-19, Auriane Viola est confortée dans ses choix.
«Je voulais continuer la perche après mon bac. En France, en école de commerce, les emplois du temps auraient été beaucoup trop chargés.» Son titre de championne de France en salle, le 23 février 2019 à Liévin, trois jours avant sa majorité, lui a ouvert des portes.
«Le plus bel objectif étant les JO de Paris-2024»
«J’ai été contactée par un organisme qui fait le lien entre les athlètes et les entraîneurs dans les universités américaines. Le feeling avec la coach de Louisville est tout de suite très bien passé. Elle a été la plus accueillante et convaincante.»
C’est ainsi que la Lingolsheimoise a jeté son dévolu sur l’université du Kentucky, 800km à l’ouest de Washington, par-delà les Appalaches. En août dernier, c’était parti pour quatre ans et un bachelor en marketing à décrocher. «Je pense diriger mon diplôme vers le marketing du sport, afin de pouvoir travailler dans ce domaine.»
Son horizon sportif est tout aussi clair. «J’ai énormément d’objectifs, à court et long terme. Le plus beau étant évidemment les Jeux olympiques de Paris en 2024. J’espère que mon travail quotidien me permettra de réaliser ce rêve.»
«En six mois, j’ai beaucoup appris sur la perche»
Le système américain peut y contribuer. «Les étudiants créent leur propre emploi du temps.» Cours jusque vers midi, entraînements dans la foulée et devoirs pour finir, tel est celui qu’elle s’est concocté.
L’athlète de l’IBAL s’en félicite. «J’ai senti un énorme progrès dans ma technique et ma condition physique. Mon corps évolue. J’ai pris des muscles et renforcé mes points faibles, tel que mon dos. J’écoute plus mon corps et j’en prends soin. J’ai aussi plus de temps pour ma récupération. Les préparateurs physiques adaptent les programmes à notre sport. La coach sait comment expliquer les choses. En six mois, j’ai beaucoup appris sur la perche.»
Son record personnel établi le 15 février – 4,15m, soit 5cm de plus que le précédent – constitue une suite logique. «Ma technique de saut améliorée, je prends de l’assurance au-dessus de 4m.»
«Je me sens beaucoup plus mature»
L’élan vers un réel envol est hélas brisé. «Je suis déçue de ne pouvoir concourir actuellement. Je suis frustrée et reste sur ma faim. L’objectif était de se qualifier pour les mondiaux juniors.» Prévus en juillet au Kenya, mais reportés.
Au début du mois, parents et frère devaient venir voir à l’œuvre celle qu’ils n’ont plus croisée depuis les fêtes de Noël et son retour en Alsace pour trois semaines. Celle qui grandit. «Habituée aux petits plats de maman, j’ai appris à me débrouiller seule. Je me sens beaucoup plus mature.»
Son prochain retour en France se profilait aussi. Mais tout est devenu flou depuis que l’Université a fermé ses portes, au moment des vacances de Printemps. La perspective de se retrouver seule dans sa résidence étudiante n’avait alors guère enchanté Auriane Viola. Mais la question ne s’est pas posée.
Si cela avait été nécessaire, Madelyn Horne l’aurait embarquée de force en mettant le cap sur Johns Creek, en Georgie, et la maison familiale proche d’Atlanta. Soit 650 km au sud.
«Je me sens comme un membre de la famille»
«C’était comme une évidence de partir avec Maddie. Notre amitié s’est forgée peu après mon arrivée à Louisville. Nous habitons dans la même résidence et faisons partie de la même équipe. Elle lance le disque. Maddie est quelqu’un d’important pour moi, elle me fait toujours rire même dans les moments les plus durs et m’encourage énormément.»
Auriane Viola avait déjà été invitée pour Thanksgiving et savait où elle mettait les pieds. «Les Horne sont très chaleureux.
Je me sens comme un membre de la famille.»
Les deux amies suivent leurs cours en ligne et continuent de s’entraîner en suivant les programmes de leurs coaches.
«On se tient mutuellement responsable pour finir nos devoirs et nous entraîner, témoigne l’Américaine. Avoir une amie à mes côtés est plus facile. Mais nous aimerions tous retourner à Louisville. En famille, cela devient vite épuisant lorsqu’on a l’habitude de vivre seul ou entre amis.»
Ce n’est pas pour tout de suite. Face à l’épidémie, les mesures ont été prises tardivement. «Elles me semblent néanmoins moins radicales qu’en France jauge Auriane Viola. Le confinement est recommandé mais nous avons encore la possibilité de nous rendre à certains endroits. Cependant, tous les magasins, excepté l’alimentaire, sont fermés.»
Dans l’incertitude
L’athlète du S2A a du mal à envisager la sortie de crise dans un pays actuellement dans l’œil du cyclone. «Elle paraît lointaine. Néanmoins, nous espérons que d’ici août, nous pourrons reprendre une vie normale.»
Rentrer en France, où elle est entraînée par Henrique Guerra, devient toutefois hypothétique. «Rentrer oui, mais si les frontières européennes restent fermées, je ne pourrais retourner aux États-Unis. Or, c’est tout ce que je veux éviter.» Son projet est trop bien engagé pour ne pas le faire perdurer. Quitte, hélas, à ne pas revoir sa famille de sitôt.
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