Info S2A... il était une foi Elise Pollini...
Source DNA du 9 juillet 2020
Il était une foi Elise Pollini
Genou en lambeaux après un accident de moto en 2017, Elise Pollini pensait avoir dit adieu à l’athlétisme. Mais la Strasbourgeoise s’est reconstruite patiemment, jusqu’à signer la meilleure rentrée de sa carrière sur 800 m... quatre ans après sa dernière sortie sur la distance.
En ces temps où le terme ‘‘résilience’’ est particulièrement à la mode, comment ne pas conter l’histoire d’Elise Pollini ? La jeune femme de 26 ans n’a pourtant pas eu à se remettre du coronavirus et refuse poliment qu’on la compare à une guerrière revenue des abysses. Mais voilà, elle est bien là, remise d’un accident qui semblait avoir relégué sa plus grande passion, l’athlétisme, au rang de lointain souvenir.
Au cœur de l’été 2017, alors qu’elle revenait d’une journée de balade à moto par-delà les cols du nord de l’Alsace, la championne de France espoir du 800 m (*) a été victime d’un accident « tout ce qu’il y a de plus bête » : « Je suivais mon père et à l’entrée de Strasbourg, il s’est arrêté à un feu qui passait à l’orange. Moi, je pensais qu’il allait continuer. Je lui ai foncé dedans et j’ai sauté de la moto pour éviter qu’elle ne me tombe dessus. Dans la chute, mon genou droit a tout pris. » Et pas qu’un peu : le tendon patellaire s’est rompu, littéralement « déchiré » même, et Elise Pollini a été opérée le soir même. La sanction est tombée le lendemain : « Immobilisation de la jambe pendant six semaines et six mois de rééducation minimum ».
« J’allais à deux à l’heure et j’étais persuadée d’être à fond »
Sa saison, déjà blanche jusque-là en raison de ses études, ne commencera jamais, pas plus que la suivante. « Pour moi, l’athlé, c’était fini », raconte la Strasbourgeoise. « J’ai dû réapprendre à plier le genou et tous les mouvements de base, comme monter les escaliers. Jamais je ne pensais reprendre la course à pied un jour. À la rentrée 2017, je suis retournée à Paris pour poursuivre mon master en Management du sport et j’ai tourné la page. »
C’était compter sans la proposition anodine de sa maman. En visite chez sa fille à la rentrée 2018, elle la convainc de s’inscrire avec elle à "La Parisienne", course caritative 100 % féminine au profit de la recherche contre le cancer du sein. « C’était totalement symbolique, on l’a courue ensemble, je me suis mise à son rythme », précise Elise, qui bouclera les 7 km en 36’27’’. « Mais ce jour-là, j’ai repris du plaisir, alors que mes premiers footings d’après-accident, ç’avait été une catastrophe. J’allais à deux à l’heure et j’étais persuadée d’être à fond ! (rires) »
Deux semaines plus tard, elle prend cette fois le départ d’un trail en région parisienne avec son petit ami, avant de s’envoler deux mois aux États-Unis, où elle se remet « à courir sérieusement » pour préparer le 5 km de la Corrida de Noël d’Illkirch. À son retour, l’ex-athlète de l’Unitas Brumath y casse la barre des 20 minutes (19’57’’) et, par là même, toutes ses certitudes. « C’est cette course qui m’a fait basculer. Mon chrono m’a fait me rendre compte que j’avais quelques restes… »
« Le corps n’oublie pas »
Les bons mots de Jacky Loos achèveront le boulot : reprise en main à distance par son fidèle entraîneur, Elise Pollini fait la saison 2019 de cross, puis l’été sur 400 m , et constate que sa ‘‘petite’’ pointe de vitesse n’a pas disparu non plus. « J’étais d’entrée sous la minute (59’’86) », explique la championne du S2A/Vendenheim Athlé. « On a fait quelques courses en relais avec le club à l’automne, Jacky a constaté que j’étais revenue à mon niveau d’avant et que j’étais prête pour refaire du 800 m. Il me le prédisait depuis le début, il le pensait vraiment. » Et il avait raison.
Après deux cross courts et un 1500 m en salle début 2020, puis un confinement « actif » dans la maison familiale de Wiwersheim au printemps, les grandes retrouvailles avec sa distance fétiche ont eu lieu le 20 juin à Meilen (Suisse). Quatre ans après. Résultat ? 2’09’’00, soit le meilleur chrono de rentrée de sa carrière sur le double tour de piste. « Rien que d’en parler, je trouve ça incroyable », sourit-elle a posteriori. « Visiblement, le corps n’oublie pas, tout simplement. Aujourd’hui, je cours pour le plaisir avant tout, je ne ressens plus la pression. Parce que pour moi, l’athlé, c’était fini. Je m’étais dit que ressentir à nouveau la sensation de courir en 2’06’’ (Ndlr : elle possède un record en 2’06’’72), ce ne serait plus possible. En fait, je me rends compte que si. »
Animée d’un second souffle, plus sereine, plus posée, Elise Pollini semble entamer une nouvelle carrière. « Je pense que ça m’a fait du bien d’arrêter », explique l’autoentrepreneuse dans l’événementiel sportif. « Ne plus faire d’athlé m’a permis de vivre, de sortir, de profiter vraiment de la fin de mes études. Je suis revenue avec un autre état d’esprit. Ce que mon genou a subi, c’est une blessure longue à soigner, mais qui ne laisse pas forcément de séquelles. Ma moto, je l’ai réparée et je suis remontée dessus un an après. La seule différence, c’est que je suis un peu devenue une petite vieille : maintenant, mon genou me dit quand le temps va changer ! (rires) »
Le temps sur la ligne d’arrivée, lui, n’a pas franchement changé, au contraire. Et ça aussi, c’est son genou qui le dit.
* * *