L’Alsacien Jeff Erius bat le record de France cadets du 100 m en 10’’36
Ce n’était qu’une question de temps, dans tous les sens du terme : en pleine forme en ce début de saison en plein air, Jeff Erius a battu le record de France cadets du 100 m ce dimanche après-midi au stade de l’Ill à Mulhouse, dans le cadre des championnats du Haut-Rhin.
Après avoir couru en 10’’65 avec 3,0 m/s de vent de face lundi dernier au même endroit, le Strasbourgeois de 17 ans est cette fois arrivé à ses fins grâce à un vent favorable de +1,5 m/s, franchissant la ligne d’arrivée en 10’’36.
L’athlète du S2A/RC Strasbourg efface ainsi des tablettes un certain Sasha Zhoya, lui-même grand espoir de l’athlétisme français, qui avait couru en 10’’41 en 2019 à la Chaux-de-Fonds.
Un peu plus tôt dans l’après-midi, Jeff Erius avait déjà couru les séries du 100 m en 10’’29, mais avec 3,0 m/s de vent dans le dos, alors que seuls 2,0 m/s au maximum permettent d’homologuer un chrono.
« C’est un poids en moins sur mes épaules », soupirait-il, soulagé, au terme de sa magnifique course. « Il y a quelques jours, il y avait trop de vent de face, puis en séries aujourd’hui, il était cette fois trop généreux... Mais je sentais que je l’avais dans les jambes et que ça allait finir par passer. Je suis très heureux, c’est une vraie fierté. Effacer quelqu’un comme Sasha Zhoya des tablettes, c’est pas rien. C’est un peu la référence chez les jeunes. Maintenant je sais que je peux le croiser dans une compétition et que je n’aurais pas à avoir peur de lui. »
Au contraire, ce sont ses adversaires qui peuvent désormais craindre Jeff Erius. Et c’est une tendance partie pour durer.
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À 17 ans, Jeff Erius écrit déjà l’histoire
Faute d’avoir pu le faire dès l’an dernier en raison de la crise sanitaire, Jeff Erius a réparé l’anomalie ce dimanche en s’emparant du record de France cadets du 100 m en 10’’36 sur la piste du stade de l’Ill, à Mulhouse. Voilà le Strasbourgeois 3e performeur mondial de l’année dans sa catégorie.
Il y a quelque chose d’assez déroutant à suivre l’ascension fulgurante de Jeff Erius depuis trois ans et demi qu’il fait de l’athlétisme. Comme si chaque pièce de son puzzle supersonique s’imbriquait le plus logiquement du monde, les unes près les autres et dans le bon ordre, respectant un scénario cousu d’or que même la longue coupure imposée par la crise sanitaire n’est pas parvenue à contrarier.
Trois mois après avoir égalé le record de France cadets de Ladji Doucouré sur 60 m lors des championnats de France en salle (6’’78), le Strasbourgeois de 17 ans a retranché cinq centièmes à celui du 100 m dans le relatif anonymat du stade de l’Ill de Mulhouse, théâtre ce dimanche des championnats du Haut-Rhin.
En 10’’36, poussé juste ce qu’il faut par un vent parfaitement régulier (+1,5 m/s), le gamin du Neuhof a écrasé de son talent une course où il n’a absolument jamais donné l’impression de s’employer, effaçant des tablettes les 10’’41 de Sasha Zhoya en 2019, lui-même star montante de l’athlétisme français.
Le plus effarant dans tout ça n’est pas tant la performance en elle-même, certes hallucinante pour un garçon encore loin d’avoir atteint sa maturité physique, mais que ses 10’’65 de lundi dernier au même endroit (avec -3,0 m/s de vent de face) et ses 10’’29 en séries ce dimanche (trop ventés cette fois, +3,1 m/s) laissaient largement présager. Non, ce qui épate, c’est l’incroyable insouciance du jeune homme, qui peine décidément à prendre conscience de la trace qu’il est déjà en train de laisser. « C’est un poids en moins sur mes épaules »
« C’est un poids en moins sur mes épaules », a-t-il d’abord lâché, le sentiment du devoir accompli. « Mais si je parle de soulagement, c’est d’abord parce que je n’avais pas été chanceux avec le vent jusque-là. Je sentais bien que j’avais le record dans les jambes, je me sens en super forme depuis un petit moment. Je suis quelqu’un de fier, je sais ce que je suis capable de faire, donc j’étais un peu frustré. Voilà, maintenant, je l’ai, c’est fait. C’était le principal objectif de ma saison. »
Sauf que celle-ci ne fait que commencer. Et que Jeff Erius est loin d’avoir atteint ses limites, comme en témoigne son coach depuis un mois au Creps de Strasbourg, Adrian Stan, qui a pris le relais d’Emma Lecerf. « Il est encore très perfectible sur ses premiers appuis, il s’écrase un peu après le départ », commente le technicien d’origine roumaine, contraint de chercher la petite bête puisque son rôle l’exige. « Il est jeune, donc il manque encore un peu de force. Mais au-delà de ça, sa performance est évidemment magnifique. Il a un tel potentiel et tellement de travail à faire encore pour atteindre sa plénitude…»
Désormais meilleur performeur français de tous les temps chez les moins de 18 ans sur 100 m, mais aussi 3e performeur mondial de l’année dans la catégorie (pour l’heure archi-dominée par l’Américain Erriyon Knighton en 10’’16), le sprinteur vedette du S2A/RC Strasbourg se sait encore plus attendu au tournant. Mais mieux armé aussi pour faire face. « Effacer quelqu’un comme Sasha Zhoya des tablettes, ce n’est pas rien », consent-il. « C’est un peu la référence chez les jeunes. Maintenant, je sais que je peux le croiser dans une compétition et que je n’aurais pas à avoir peur de lui. »
C’est au contraire les autres qui peuvent se faire du sang d’encre dès lors qu’il est annoncé au départ d’une course, sauf Théo Schaub peut-être, qui a l’immense avantage de côtoyer le spécimen tout au long de la semaine à l’entraînement à Strasbourg. « Il gère vraiment bien la pression, et ça, c’est très intéressant »
L’Illzachois de 20 ans a d’ailleurs profité de "l’aspiration" de son jeune ami pour améliorer de trois centièmes son propre record personnel sur 100 m (2e en 10’’62), avant de décrocher une deuxième couronne départementale, sur 200 m cette fois, mais encore derrière le maillot bleu étoilé du Bas-Rhinois. Leurs chronos ? 20’’97 pour Erius, 21’’09 pour Schaub, avec malheureusement un vent trop généreux (+2,9 m/s).
« Je suis soulagé par mon 100 m, mais je n’avais plus de jus sur 200 m », avoue le sprinteur de l’AC Illzach-Kingersheim. « Sur les deux courses, je vois Jeff s’évader et je me crispe. Il va pourtant falloir que je m’habitue à avoir des mecs devant moi, ce sera le cas aux championnats de France et ce sera le cas aussi si j’arrive à me qualifier pour l’Euro Espoirs sur 200 m. » Et de jeter un regard de ‘‘grand frère’’ vers son brillant camarade d’entraînement : « Sur 100 m, quand j’ai vu l’écart qu’il avait creusé, j’ai espéré qu’il avait battu le record de France. Non seulement je lui souhaitais vraiment, mais en plus, ça voulait dire que j’avais fait un bon chrono aussi. Il gère vraiment bien la pression, et ça, c’est très intéressant. »
À voir Jeff Erius distribuer ses immenses sourires aux quatre coins du stade de l’Ill, on ne peut que lui donner raison. « Je ne m’attendais pas à aussi bien sur 200 m, c’est assez étonnant », réagit l’intéressé. « Après mon 100 m, j’avais un peu la flemme, j’avais le sentiment que l’essentiel était fait. Du coup, j’étais sans doute encore plus relâché et ça m’a permis de dépasser Théo. Le vent est irrégulier, mais ce n’est pas grave. Je vois qu’un chrono sous les 21 secondes est possible. C’est alléchant. »
Voilà, c’est dit : c’est alléchant. Comme tout ce qui touche à la carrière de Jeff Erius désormais.
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